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YASMINA KHADRA, OGNI SUO LIBRO E' UN MONDO NUOVO CHE SI SVELA



CERCLE DU LIVRE

UN NUOVO APPUNTAMENTO DI "CERCLE DU LIVRE" PER I VISITATORI FRANCOFONI DI LIBRISOTTOSOPRA.COM


Samedi 2 juillet 2022, 15h, nous sommes 9 devant nos écrans pour échanger au sujet du roman que nous avons lu “Le Sel de tous les oublis “ de Yasmina Khadra paru en 2020 et qui a obtenu en 2021 le Prix de l’Académie des Baobabs.

Pour un certain nombre d’entre nous, l’auteur était déjà connu puisque nous avions lu d’autres romans, en particulier “L’Attentat” qui nous avait beaucoup plu.

Comme d’habitude, tout d’abord quelques mots sur l’auteur:

En 1955, à Kenadsa dans le Sahara algérien, naît Mohamed Moulessehoul; C’est sous ce nom qu’il publiera quelques nouvelles et romans . Confié dès l'âge de 9 ans à une école militaire par son père lui-même militaire, il fera une carrière dans l’Armée qu’il quittera en 2000 pour se consacrer à sa véritable passion: L’écriture.


LE PSEUDONYME

Dans les années 90, pour des raisons de censure militaire il prend le pseudonyme Yasmina Khadra , les deux premiers prénoms de sa femme ,Yamina Khadra Amel, qu’il remercie par ces belles paroles.

Mon épouse m’a soutenu et m’a permis de surmonter toutes les épreuves qui ont jalonné ma vie. En portant ses prénoms comme des lauriers, c’est ma façon de lui rester redevable,

sans elle, j’aurai abandonné. C’est elle qui m’a donné le courage de transgresser les interdits. Lorsque je lui ai parlé de censure militaire, elle s’est portée volontaire pour signer à ma place mes contrats d’édition et m’a dit cette phrase qui restera biblique pour moi:” Tu m’as donné ton nom pour la vie, je te donne le mien pour la postérité”.

Et ce n’est qu’en 2001, dans L'écrivain, que l’auteur révèle sa véritable identité.


La première considération commune à presque toutes a été la difficulté à entrer dans le roman, à “accrocher”; au début, il a ennuyé, parfois énervé avec ses dialogues moralisateurs… quelqu’un, contrarié par le protagoniste trop négatif, déprimant, a même pensé abandonner…. Mais par bonheur il y a le style, la langue et Yasmina Khadra encore une fois nous a enchantées. Les descriptions des paysages algériens, de beaux passages pleins de poésie “ Le soir dispersa sa poudre de fée dans le ciel. Un croissant de lune ouvrait une parenthèse au sommet de la montagne. les arbres se tenaient roides dans leur mutisme, pareils à des eunuques veillant sur le sommeil de leur maître. On entendait à peine la brise fourrager dans les buissons. Par intermittences, quelque part dans l’obscurité, un animal égaré implorait sa horde, sans doute effarouché par la nuit qui avançait, parée de mille dangers.” p. 80., d’autres où l’on sent vibrer l’esprit sous l’effet de l’alcool et des drogues:” Durant ses retraites opiacées, Adem se voyait pourchassant Hadda à travers un champ rouge de coquelicots heureux comme un adolescent qui s’éveille aux choses de l’amour”. p.247 d’autres encore où l’analyse de l’humain crève la page: “ Ce fut ce soir là que l’agent dormant qui attend son heure en chacun de nous, l’entité pernicieuse et fourbe qui fait celle qui n’est pas là pour mieux nous prendre de revers, le monstre implacable qui se nourrit de nos frustrations et de nos rancoeurs inassouvies, surgit dans toute sa splendeur diabolique des zones d’ombre de l’instituteur et se substitua à son être, le rendant étranger à lui-même, et Adem laissa, avec une sorte d’allégeance, le relent calamiteux et la damnation empuantir son âme" p.249, et encore des dialogues riches de réparties pleines d’aplomb… au fil des rencontres le long de la route d’Adem.


Ses rencontres…..Il va en faire des rencontres, Adem, tout au long de son errance, de son voyage en quête d’un sens à donner à sa vie brisée par le départ de sa femme: A commencer par les internés et le directeur de l’hôpital psychiatrique, Mika le nain, Turambo le boxeur ,un charretier, un garde forestier, Arezki et Slim, Mekki et Hadda, Sy Hafid…etc….À chaque rencontre Adem élève un mur d’indifférence, de mysanthropie voire d’agressivité face à la disponibilité et à la générosité de ses interlocuteurs.On aurait voulu penser que chaque rencontre ait fait évoluer le protagoniste ;mais seulement quelques petits pas en avant comme la conversation avec le directeur de l’asile sur la lecture et les auteurs russes…. le moment où il décline son identité à Mika mais il n’y aura aucune évolution significative. Adem, un anti héros à travers lequel l’auteur semble nous dire: Ne faites pas comme lui…



LES PERSONNAGES

Un des personnages qui a attiré notre attention est Mika: sa vivacité, ses discours philosophiques ont plu à certaines; mais d’autres l’ont trouvé peu crédible, trop parfait, irréel… il arrive toujours au bon moment…Serait- il le double de Adem?

Deux seuls personnages féminins. Dalal et Hadda. La première “ Une fille de son temps …avait grandi parmi les Européens”, la deuxième,probablement de religion musulmane, vit depuis toujours à la campagne “ dans ces régions enclavées, la femme était l’armure de l’homme et son talon d’Achille, la somme de toutes ses prières et de toutes ses abjurations.” p.220.

Si au début, Adem n’admet pas les raisons de sa femme “C’est ridicule, voyons. Tu es une femme mariée, responsable, adulte.Tu ne peux pas te permettre des écarts de conduite de cette nature.” p.12, quand il rencontre Hadda, frappé par sa beauté il se confie à elle: “ Il m’en a fallu, du temps et des chemins pour me rendre compte que la femme n’est pas un bien, mais un être à part entière. si la mienne est partie, ce n’est pas parce que je n’ai pas su la garder, mais parce qu’elle voulait vivre sa vie. Et elle avait raison. On n’a qu’une seule vie.” p.209. Et, obsédé par ce corps de femme , il fera tout…il ira même jusqu’à préméditer un assassinat, pour la convaincre de laisser son mari.

Et Yasmina Khadra unit ces deux femmes dans leur choix de vie même si diamétralement opposé: Dalal choisit de quitter son mari, Hadda de rester fidèle à Mekki infirme. Comme pour souligner l’importance du respect de l’homme envers la femme.

Un autre personnage secondaire mais pas tant que ça, invisible mais très présent, mystérieux… l’oncle de Adem, illétré,infirme, cul-de-jatte comme Mekki. Ses paroles, perles de sagesse reviennent à l’esprit de Adem de temps en temps :” Si tu pars du principe que ce qu’il t’arrive fait partie de ta propre histoire, tu trouveras la force de t’accepter tel que tu es” p. 120 “ Si une comète heurtait la terre, elle modifierait toutes choses en ce monde sauf la manie qu’ont les hommes de toujours chercher ailleurs ce qui, parfois est à leur portée” p.209.. A demi mots, l’auteur nous laisse comprendre que, dans le passé, Adem aurait aidé son oncle à mettre fin à ses jours: “ C’est mon oncle qui voulait en finir. Il m’avait imploré, supplié de le délivrer de ce monde impitoyable…… Cette nuit-là, j’avais détesté ma main, mon ombre,.... j’avais résilié tous les serments et maudit les saints et l’humanité entière.” p.263; et cela serait, selon lui, la cause de tous ses malheurs “Vois comme je paye, maintenant. La trahison de Dalal est la peine que je dois purger pour le restant de mes jours.” p. 121


LE CONTEXTE HISTORIQUE

Sur un point nous avons été toutes d’accord, le contexte historique: intéressant et nouveau le choix de situer la narration, en mai 1963, immédiatement après l’indépendance de l’Algérie signée en 1962. Ce qui permet à l’auteur de placer des considérations sur l’époque coloniale précédente et la guerre d'indépendance - "épouvantable" - p. 78: “Il y avait trop de naufragés de l’Histoire avec crucifié sur le front, l’espoir qui leur avait permis de survivre à deux mille ans de joug colonial” “La vie était dure. La misère et les épidémies décimaient des familles entières” , mais aussi de souligner les difficultés du pays à passer le cap “ L’Algérie vient d’accoucher par césarienne d’une nation en état de choc” p. 202 “ Je croyais la tyrannie vaincue” dit Hadda et Mekki lui répond: “Elle a seulement changé de visage” p.172. Le personnage de Ramdane Bara, le mouhafedh en est la preuve.

Et alors, il faut miser sur l’éducation des enfants, sur l’école, explique Sy Hafid, le chef de la cellule locale du parti: “ C’est la raison pour laquelle nous devons céder la place à la nouvelle génération, celle de l’avenir. Et c’est là que vous intervenez, monsieur l’instituteur. C’est à vous que revient l’insigne honneur de former l’Algérien des lendemains qui chantent. Ce n’est pas par les bombardiers et les chars, mais par l’école, que les peuples accèdent à une place honorable dans le concert des nations” p. 202.

Intéressante aussi la description du conseil des Anciens des Ouled Lahcène,p.212, 213, 214 ce conservatisme tribal qui, paradoxalement sera vaincu par la sagesse du doyen “ Aucun bastion n’est un abri s’il refuse d’admettre que les choses changent autour de lui. Nous sommes obligés de mettre nos pas dans la marche du temps, car le temps n’attend personne.” P.215


QUELQUES QUESTIONS POUR TERMINER

Pour terminer, nous nous sommes posé quelques questions.

Tout d’abord quel rapport entre Adem et Don Quichotte représenté en couverture du livre éditions Pocket. A part le thème de l’errance en quête de réponses à des questions existentielles, le personnage de Adem nous a semblé plus négatif voire plus antipathique que Don Quichotte.Le rapprochement avec Sur la route de Kérouac, non plus, n’a pas convaincu. Par contre, quelqu’un a vu dans Adem, indifférent à tout et à tous, quelque ressemblance avec Meursault de l’Etranger.

Le bandeau qui entourait notre édition disait: Cet ouvrage contient une fin alternative inédite. Cet épilogue, en général, n’a pas été apprécié. Peut- être est-il utile pour achever de contextualiser le roman dans l’histoire de l’Algérie avec l’allusion au coup d’état qui a

renversé Ben Bella en juin 1965. Nous, nous aurions préféré que le roman se termine à la fin du chapitre 21 avec la énième intervention providentielle de Mika même si seulement imaginaire dans le délire de Adem et le fond sonore du luth et des mots du poème qui a donné le titre du roman, enveloppant de mystère le sort du protagoniste.

Le titre, donc .C’est à la page 31 qu'apparaissent pour la première fois de la voix d’un musicien les vers qui donnent lieu au titre “Le sel de la mer”. Nous les retrouverons plusieurs fois au cours du roman et à la fin. Nous avons cherché à l’interpréter:

Peut-être faut-il oublier le passé pour mieux vivre le futur….ou bien, de même que le sel donne de la saveur aux aliments, il faut donner de la valeur à l’oubli….

Par bonheur, une des participantes ayant échangé avec l’auteur sur son site internet, nous a livré une explication de source sûre:” La mer symbolise toutes les larmes que l’on verse pour un amour perdu… Que reste-t-il d’une mer asséchée: le sel… ce qui reste de ce que nous croyons pouvoir oublier.. le sel corrosif… c'est-à-dire tous les regrets.” . (M.R.)


Le sel de tous les oublis - Yasmina Khadra - Editions Pocket.

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